Les coulées d’eaux boueuses sont des épisodes qui surviennent lors de fortes pluies sur des terrains agricoles. La pente du terrain, l’absence de végétation, la structure des sols et l’intensité des précipitations vont induire un détachement de particules de terre et former des coulées d’eaux boueuses. L’écoulement peut ensuite se déposer au bas des parcelles agricoles dans les cours d’eau et toucher les habitations. Afin de prévenir ce risque, une stratégie basée sur l’hydraulique douce et la modification des pratiques agricoles permet d’en limiter les dégâts.

Résumé

Aléa(s) climatique(s) ciblé(s) : Forte pluie, inondation et risque sur la biodiversité
Solutions d’adaptation : Mise en place de dispositifs d’hydraulique douce sur terrains agricoles et changement des pratiques culturales
Coût global : un dispositif varie entre 75 et 125€ /ml à l’implantation
Maître d’ouvrage : Eurométropole de Strasbourg
Maître d’œuvre : Eurométropole de Strasbourg

Enjeux d'adaptation

Les événements de coulées de boue sont liés aux enjeux d’érosion des sols.

Le risque érosif du sol induit par l’absence de végétation, les modes de travail agricole et la structure du sol est accentué en période de précipitation ce qui provoque des coulées d’eaux boueuses. Ce risque va entraîner à la fois des pertes de sol agricole importantes et des dégâts sur les habitations et les espaces naturels environnants.

Solutions

Domaine d’application : Milieu agricole

Afin de limiter les conséquences sur les habitations et sur les pertes de sol agricole différents moyens sont mis en œuvre : des dispositifs curatifs et préventifs.

Dispositifs curatifs : hydraulique douce

Objectifs :

  • Limiter l’érosion des sols
  • Ralentir l’écoulement de l’eau
  • Filtrer l’eau et favoriser la sédimentation des boues

Les dispositifs d’hydraulique douce ont pour objectif de ralentir le ruissellement, filtrer l’eau et sédimenter les boues. Ils sont disposés au travers de l’écoulement des eaux en fonction de la pente, du bassin versant et de la forme des parcelles. Différents dispositifs existent : les fascines, les haies et les bandes enherbées.

La haie : Couvert végétal dense composé d’une multitude d’arbustes de variétés locales de préférence. Il offre de nombreux avantages antiérosifs et un intérêt pour la biodiversité et la composition paysagère.

La fascine vivante : Aménagement végétal constitué de fagots disposés en longueur. La plantation d’une haie y est associée pour assurer la pérennité et améliorer l’efficacité de l’installation.

La bande enherbée : Bordure de parcelle recouverte d’un couvert végétal qui offre un système racinaire et une surface de dépôt des sédiments pour ralentir l’écoulement des coulées de boue. Les bandes enherbées peuvent être composées de végétation spontanée ou d’essences végétales particulières.

Un exemple d’espèce particulièrement intéressante : le miscanthus.
C’est une plante herbacée pérenne, très efficace et qui apporte un intérêt économique aux agriculteurs. Elles peuvent être exploitées en paillage horticole ou comme source d’énergie (chaudière biomasse). Cependant, une attention particulière doit être prise pour l’hybride à implanter. Il est important de choisir l’espèce Giganteus afin d’éviter le risque invasif.
Pour plus d’informations sur ces dispositifs, des « Fiches érosions Volet Hydraulique douce » sont disponibles au niveau des ressources complémentaires.
 

Entretien des dispositifs

Les haies doivent les premières années être taillées et désherbées pour favoriser une bonne croissance des plants. Puis, une taille tous les 2 ans est suffisante. 

Les fascines ont besoin d’un remplacement des fagots tous les 4 à 5 ans et un remplacement total tous les 8 ans. En association avec une haie, les produits de la taille permettent un renouvellement durable des fagots.

Les bandes enherbées doivent être fauchées annuellement. Il est préférable d’éviter de faucher entre début avril et mi-juin pour obtenir une forte densité végétale en période orageuse.

Dispositifs préventifs : modifications des pratiques agricoles

Objectifs : 

  • Limiter le ruissellement de l’eau
  • Améliorer la qualité du sol en taux de matière organique

Les techniques de prévention du risque de coulées d’eaux boueuses sont liées aux pratiques agricoles. On trouve différentes techniques : l’assolement concerté, les techniques culturales sans labour et une agriculture de conservation des sols.

Assolement concerté :

Diversification du type de culture disposé sur les parcelles. Afin de ralentir l’écoulement des eaux, il est favorable d’alterner des parcelles avec des cultures qui donneront un couvert végétal pendant la période à risque (mai à début juillet) et des parcelles laissées à nu. Cette technique nécessite une concertation des exploitants agricoles.

Techniques culturales sans labour :

Pratiques de travail du sol sans retournement. Les caractéristiques physiques du sol sont suffisamment modifiées pour l’implantation de cultures tout en évitant le retournement en profondeur. Cela va diminuer le risque érosif en améliorant la stabilité structurale du sol et augmenter le taux de matière organique en favorisant les activités biologiques du sol.

Techniques de conservation du sol :

Pratiques culturales qui redonnent de la vie au sol. Le travail du sol est fixé au minimum, une diversité de cultures est favorisée et une couverture du sol est installée. Sur la base de ces 3 principes, l’agriculture de conservation améliore l’infiltration de l’eau, le stockage du carbone, la préservation de la biodiversité et la résilience au risque érosif.

Expérimentation de la solution

Stratégie de prévention des coulées d’eaux boueuses

L’Eurométropole de Strasbourg connaît des événements pluvieux qui ont donnés lieu à des coulées d’eaux boueuses assez fréquemment. Elles ont déjà touché 9 communes en 2018. Face à ce risque, des mesures sont prises suivant une stratégie afin de déployer les dispositifs d’hydraulique douce et sensibiliser le monde agricole aux mesures préventives.

Une caractérisation du risque a d’abord été réalisée en partenariat avec le BRGM et a permis de qualifier l’aléa « coulées d’eaux boueuses » et de planifier des outils de lutte contre ce risque. Des dispositifs curatifs ont été mis en œuvre et des mesures préventives ont été prises par les exploitants sur les 14 communes concernées.

Sur la commune d’Hangenbieten par exemple, un plan d’assolement a été suivi et des dispositifs d’hydraulique douce tel que des fascines vivantes, bandes enherbées et bandes de miscanthus ont été installées.

Retour d’expérience

Depuis l’installation de dispositifs d’hydraulique douce, les communes de l’Eurométropole de Strasbourg ont subi beaucoup moins de dégâts qu’auparavant lors d’événements de coulée de boue. Lors de fortes pluies, l’eau boueuse s’accumule sur les dispositifs d’hydraulique douce ce qui limite de manière curative les risques.

Sur le long terme, il est important de développer les pratiques d’assolement concerté et de culture sans labour qui sont plus efficaces que les dispositifs d’hydraulique douce. Ce sont des mesures qui vont agir de manière préventive. Elles vont améliorer la nature du sol et éviter un écoulement à l’échelle du bassin versant.

Budget et financement

Les dispositifs d’hydraulique douce ont des coûts qui varient selon la technique entre 75€/ml pour les haies et 125€/ml pour les fascines vivantes à l’implantation.

L’implantation et la gestion des dispositifs est réalisée par les services de l’Eurométropole. Dans certains cas, l’entretien peut être réalisé par les exploitants agricoles suivant une convention avec rémunération. Pour la perte et la gêne occasionnées par les dispositifs, ils reçoivent également une indemnité à hauteur de 18,44 € /a /an.

Complexité de mise en œuvre

Le risque de coulées d’eaux boueuses est fortement lié aux pratiques culturales et remet en cause le système agricole actuel. Des difficultés sont rencontrées aux niveaux de la sensibilisation et la mobilisation des agriculteurs dans la mise en place de dispositifs de lutte contre l’érosion. Ce sont des mesures qui ne sont difficilement acceptées, elles demandent un investissement dans du matériel spécifique, une gêne de la zone d’exploitation et une gestion des dispositifs. C’est pourquoi il est important de parler de l’intérêt économique lié à la diminution de l’érosion du sol.

Réunions de concertation des agriculteurs

Afin de convaincre les agriculteurs de mettre en place des mesures de prévention des risques de coulée d’eaux boueuses. Des réunions peuvent être organisées autour des risques et des solutions. Au cours de ces réunions, il peut être intéressant de réaliser une visite de parcelle pour présenter les techniques culturales sans labour et mettre en place un plan de gestion d’assolement concerté.

Contacts

EUROMEROPOLE DE STRASBOURG

Equipe hydraulique douce
Benedicte.PETITJEAN@strasbourg.eu

CHAMBRE D’AGRICULTURE ALSACE

Equipe agronomie sol érosion
olivier.rapp@alsace.chambagri.fr
remy.michael@alsace.chambagri.fr

SYNDICAT DES EAUX ET DE L’ASSAINISSEMENT ALSACE MOSELLE

Equipe préservation et gestion des ressources
helene.perrin@sdea.fr

Sites pilotes

Breuschwickersheim, Eckwersheim, Lampertheim, Mittelhausbergen et Oberhausbergen, Niederhausbergen

Ressources complémentaires

Fiches érosion Volet assolement concerté et Hydraulique douce
Syndicat des Eaux d’Assainissement d’Alsace Moselle (SDEA)

Risques de coulées d’eaux boueuses
Prévenir les coulées d’eaux boueuses (Eurométropole de Strasbourg) :
https://www.strasbourg.eu/prevenir-coulees-eaux-boueuses

Crédits

Direction Eau et risques environnementaux, service gestion et prévention des risques environnementaux
Agence du climat sur l’Eurométropole de Strasbourg
Chambre d’agriculture Alsace